2007 : Les énergies de la mer > TR5 : Gouvernance et aménagement du territoire : articulation entre les plans Energie français, la Gestion Intégrée des Zones Côtières en Bretagne et les Chartes des espaces côtiers en Bretagne, en Europe et dans les Dom-Tom; droits, directives >
Quel rôle pour les ONG dans la concertation ?Quel rôle pour les ONG dans la concertation ?
Guy Le Fur, Président de Riac 29 (Réseau d’Initiative et d’Action Climat 29)
Biographie :
LE FUR GuyCompte rendu :
Voir la vidéo de
Guy Le Fur
Transcription :
19 octobre 2007 TR5
Discours de Guy Le Fur :
Bonjour à tous. Je suis un peu gêné parce que je ne suis pas un spécialiste des énergies. Je suis le Président du RIAC 29 (Réseau d’Initiative et d’Action Climat 29). Ce réseau a comme objectif de faire prendre conscience à l’ensemble des citoyens, aux élus, aux acteurs économiques, de l’importance du changement climatique en se basant sur un certain nombre de rapports largement diffusés à partir du travail fait par le groupe d’experts internationaux sur le climat. Le GIEC conduit à faire un certain nombre de scénarios et de prévisions qui doivent alerter tout le monde, en considérant que nous avons à peu près 10 ans pour réagir.
Ils sont à leur 4ème rapport actuellement et depuis le dernier, il ne se passe pas deux semaines sans que de nouveaux évènements viennent confirmer les prévisions, voire même que leur rapport se trouve être en dessous de ce qui risque de se passer, parce que des éléments nouveaux interviennent régulièrement qui définissent un peu l’amplification de ces phénomènes-là.
Une seule chose, c’est qu’il y a au travers de l’histoire – et ceux qui ont vu le film d’Al Gore peuvent s’en rendre compte – une corrélation entre le niveau de CO2 dans l’atmosphère et le niveau de réchauffement climatique et ceci, sur un espace de 600 000 ans. Nous sommes passés depuis le XIXe siècle à une augmentation de température et à une moyenne de 280 parties par millions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à 384 actuellement. Les experts pensent qu’il va être à 450 pour 2050, chose qui ne s’est jamais vue dans l’histoire de l’humanité et de la planète. On peut se retrouver dans une situation d’autant plus inquiétante que parallèlement à ça, nous aurons un problème d’accès à l’eau potable pour presque la moitié de l’humanité : 3 milliards d’individus risquent d’avoir des difficultés d’accès à l’eau potable et des problèmes de nourriture dûs à une extension des déserts. Un problème de sécheresse imprévisible en Australie plus une réduction de l’ordre de 60% des rendements en céréales en Ukraine peuvent bouleverser totalement le marché mondial des produits alimentaires.
Le dernier point le plus important peut-être, c’est que l’augmentation de température avec en plus la possibilité de voir le Groenland fondre peut se traduire par une augmentation importante du niveau des mers exprimée parfois à 6 m si tout fond. Cela signifie qu’il y aura beaucoup de terres inondées et qu’on va assister à plusieurs centaines de millions de réfugiés climatiques. Qu’est-ce qu’on va en faire ? Comment cela va se passer ? Nous avons eu un engagement de l’Etat français, le Président Sarkozy a annoncé à l’ONU que la France s’engageait à diviser par 4 ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050.
Vous imaginez ce que cela veut dire ? Réduire de 75% nos émissions de gaz à effet de serre en l’espace de 45 ans, c’est important ! Et ceci, dans un contexte de raréfaction des énergies fossiles et de forte augmentation des prix, parce qu’il ne se passe pas de semaines sans qu’il y ait une augmentation du prix du baril de pétrole. Donc, un changement très ambitieux est absolument indispensable si on veut préserver la planète.
On m’a demandé de vous faire part de mon expérience. Je suis agriculteur en retraite et comme 80% des agriculteurs, à 14 ans, je suis resté sur l’exploitation sans avoir eu la possibilité d’avoir un parcours scolaire, ce qui est difficile à imaginer aujourd’hui. Je me suis retrouvé dans l’exploitation à un moment absolument fantastique, c’est le marché commun agricole qui se mettait en place en 1958-1960. Ce marché commun avait fixé des objectifs et une mission à l’agriculture. Les six pays ont dit que l’agriculture devait remplir un certain nombre de missions :
- combler le déficit alimentaire de l’Europe
- réduire son nombre d’actifs pour faire face à la demande de l’industrie d’avoir de la main-d’œuvre
- arriver à un développement territorial assez dynamique
L’objectif étant fixé, une politique d’est mise en place, avec des lois et une mobilisation de l’expertise. (…)
15 ans plus tard, l’objectif a été atteint. De déficit, nous sommes arrivés à l’équilibre, voire même à un léger excédent. En 15 ans, l’agriculture a fait un bond supérieur aux 250 années précédentes en matière d’évolution, mais en perdant 50% de ses actifs.
Ces 15 années ont été extraordinaires et nous avons assisté à la création de multiples organisations, coopératives mutualistes de gestion … Cela a forgé un bon climat de convivialité, de solidarité et de partage dans le milieu agricole. C’était assez extraordinaire comment un corps social s’est rassemblé pour que non seulement il évolue, mais qu’il fasse évoluer son milieu en même temps.
Mais une logique n’a pas été prise en compte. Lorsqu’une politique a atteint ses objectifs, elle doit être changée parce que les conditions qui ont prévalues à sa mise en place sont totalement modifiées. Et le drame au niveau de l’agriculture, c’est qu’on n’a pas changé de politique, on est resté avec la même logique, qui a entraîné un certain nombre de difficultés tant en matière de revenus, de faillite, de coût budgétaire colossal …
Si j’ai voulu présenter cela, c’est que je considère que la situation de l’agriculture en 1960 et les problèmes qui nous sont posés aujourd’hui au niveau de la société ont beaucoup de similitudes, parce que d’une part, il ne s’agit plus d’agriculture mais de la planète. Il faut donc voir un peu les degrés d’importance, car nous avons le destin de l’humanité entre nos mains. Les spécialistes considèrent que les dix prochaines années seront déterminantes du fait de l’objectif clair d’un facteur 4 auquel il faut rajouter le risque de pénurie des énergies fossiles annoncées par l’Agence Internationale de l’Energie. Cela va donc modifier totalement notre façon de produire, de consommer et de se déplacer. Il faut alors réinventer l’avenir avec une perspective de devoir rechercher quels sont les moyens de faire des économies d’énergie et de mettre en place les énergies renouvelables. Alors, il nous faut un chef d’orchestre pour mettre en synergie tous ces acteurs et ces institutions. C’est un challenge fantastique ou au contraire dramatique, selon la façon dont les choses vont être prises en compte par la société toute entière. Où nous nous replions sur nous-même pour le « toujours plus » pour vivre intensément le moment sans se préoccuper des répercussions sur l’entourage. Il faut arriver à donner la priorité à la solidarité, à la convivialité, le goût de vivre et construire une nouvelle société. Notre destin est entre nos mains ! Pour cela, il est important de définir une stratégie puisque l’objectif est clair, il a été fixé. Définir une stratégie, théoriquement le Grenelle de l’Environnement doit le faire : quelles orientations vont être retenues, quels seront les moyens dégagés au niveau financier, institutionnel ou pour la mobilisation des acteurs, et ensuite recueillir l’adhésion et la participation de tous à ces activités et le rôle important du milieu associatif qui a l’avantage d’être présent au niveau du terrain et qui sert souvent de représentation des forces vives.
J’ai assisté au Grenelle de l’Environnement à Brest mardi dernier, ils vont décider théoriquement à la fin du mois de tout l’ensemble de l’enjeu qui sera défini. Comme plusieurs autres, nous avons souligné la faible part donnée à la maritimité en France et surtout dans une région comme la nôtre qui a 2700 km de côtes, c’est important et nous avons des ressources importantes, fonction de quoi ces entretiens Science et Ethique, une fois de plus, tombent à point.
Mis à jour le 06 mars 2008 à 12:03