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2006 : La biodiversité du littoral > TR 2 : Outils et modèles de recherche pour étudier les écosystèmes >  Le projet Litto 3D

Le projet Litto 3D

Laurent Louvart, Ingénieur en chef de l’armement (DGA). Hydrographe de la marine, directeur de la section Géodésie-Géophysique du Service Hydrographique et Océanographique de la Marine.

Biographie :

LOUVART Laurent

Compte rendu :

Voir la vidéo de Laurent Louvart


Transcription :

13 octobre 2006 TR2


Discours de Laurent Louvart


Bonjour,

Je remercie le comité scientifique des entretiens Science et Ethique de m’avoir invité aujourd’hui pour parler de Litto 3D. Je profite de cette tribune pour rappeler en quoi consiste le projet, même s’il a déjà été évoqué l’année dernière et encore ce matin. De toute évidence, de nombreuses applications liées à la biodiversité nécessitent de bien connaître le littoral de façon à ce que les différentes études, les différents enjeux qui s’y traitent y apparaissent de façon cohérente. La première cohérence qu’il faut assurer qui est dans le domaine du SHOM et de l’IGN , c’est finalement d’assurer déjà une première cohérence géométrique entre les différentes informations d’où qu’elles proviennent. Ce projet est né d’une recommandation européenne dont a parlé Christophe Le Visage précédemment. Il a été relayé en France par des groupes de travail du CNIG , qui avait étudié le littoral et ses différentes applications. Progressivement, cette décision a été relayée en comité interministériel de l’aménagement du territoire et, à cette occasion, pour le volet qui consistait à fournir une altimétrie au travers de l’inventaire national qu’il fallait faire, le SHOM et l’IGN ont été désignés conjointement pour procéder à cet inventaire, le SHOM sur la partie marine et l’IGN sur la partie terrestre. C’est donc ce projet qui a déjà deux ans d’âge que je vais vous décrire à présent et vous dire où on en est rendu, quels problèmes ont été résolus et quels perspectives et problèmes restent à résoudre.
Les besoins et les constats, je pense qu’on les connaît déjà tous, ils ont été en partie réévoqués ici. Sur cette diapo, je vous montre toute la problématique actuelle. Je fais apparaître sur la diapo l’assemblage entre une carte du SHOM et une carte IGN et on voit aujourd’hui que les données telles qu’elles existent actuellement sont insuffisantes pour créer ce modèle numérique de terrain (MNT) dont vous avez tous besoin pour appuyer vos études. D’une part, vous avez le SHOM qui a l’habitude de travailler dans le cadre de la sécurité nautique – c’est sa première mission – et qui a focalisé toutes ses mesures aux endroits où les bateaux naviguaient. On se rend compte que la donnée est parfois très précise et très dense mais seulement à certains endroits et il y a des tas d’endroits, de vasières, de prés salés qui ne sont pas investigués aujourd’hui ni par l’IGN ni par le SHOM. On peut s’en assurer avec le zoom où on voit apparaître des points de mesure de profondeur en violet et un modèle altimétrique IGN qui, vue d’ici, semble donner toute satisfaction, mais qui, à l’exploitation, ne tient pas non plus la route dans la mesure où nombre des points mesure de relief proviennent de l’exploitation de photographies aériennes. Si cette information est partout dense, elle a, en revanche, l’inconvénient aujourd’hui de ne pas être précise notamment sur le z (altitude) puisqu’on arrive à des incertitudes dans le Golfe du Morbihan qui vont jusqu’à 1,5 m et dans les Landes jusqu’à 6 m. Si vous utilisez ce type de données SHOM ou IGN aujourd’hui, et si vous voulez faire tourner des modèles hydrodynamiques ou des modèles de déversement d’eau, retrouver un trait de côte, étudier le domaine public maritime avec ce type de données, vous n’aurez pas toutes les informations.
Il y a une première étape dans le projet qui consiste à fournir mieux que ce que l’on fournit aujourd’hui au travers de nos différents produits apparents, ceux qui sont catalogués. Il faut savoir qu’une carte marine n’est destinée qu’aux navigateurs, et n’est qu’une condensation de ce que contiennent nos bases de données. Nos bases de données contiennent beaucoup plus d’informations que celles qui figurent sur les cartes. Donc une première étape de Litto 3D est de fournir à tous les acteurs du littoral, à tous les chercheurs, un accès facile à ces données. Cette étape est aujourd’hui franchie. Sur le site du SHOM, un catalogue est en ligne avec les nouveaux produits accessibles, diffusés pour un coût marginal de diffusion. Ces données sont maintenant réellement accessibles au public, elles ne sont plus réservées à un public averti, à un public de connaisseurs, on essaie d’en faire la plus grande promotion possible. Parallèlement, même si beaucoup de données sont mises à disposition aux utilisateurs, il y a des zones très partiellement décrites, il était donc nécessaire dans le projet de prévoir, en plus de cette mise à disposition de l’existant, des relevés systématiques de tous les endroits qui ne l’étaient pas. Le but de ce projet est de faire sortir le SHOM et l’IGN de leurs travaux habituels en ce sens où le SHOM va s’intéresser à des parties où habituellement il n’intervenait pas pour des raisons de mission mais aussi pour des raisons physiques – il est très difficile topographier une zone découvrante, l’estran, une zone de pré salé … Le SHOM et l’IGN s’associent donc pour étudier les techniques de mesures aéroportés sur la partie terrestre au Lidar rouge qui renvoie des signaux altimétriques intéressants, très précis et sur la mer au bathymètre laser qui travaille dans des rayons laser de couleur verte ou bleue selon les régions et qui lui rend, à des endroits très faiblement immergés où il est très difficile de naviguer par des moyens conventionnels, un signal altimétrique intéressant qui viendra compléter notre connaissance de l’existant littoral. Le SHOM, en plus de ses bateaux, de ses moyens conventionnels, utilise et sous-traite ce type de nouveaux moyens d’acquisition aéroportés.
Le SHOM a fait un essai en juin 2005 dans le Golfe du Morbihan. On aurait pu choisir la Rade de Brest, simplement sur le Golfe du Morbihan, le SHOM avait des projets de refonte cartographique et des thématiques très variées permettaient de tester la méthode aéroportée et son couplage avec le sondage classique par sondeur. Après une dizaine de jours passés sur place et dix heures effectives de sondage dans les airs, voici le type de cartographie qu’aujourd’hui on est en mesure de proposer avec les moyens actuels mis à notre disposition. Techniquement, le résultat n’est pas très surprenant parce qu’on retrouve les spécifications annoncées par nos prestataires. Au travers de ce démonstrateur, l’idée était de faire envie aux régions qui souhaitaient disposer chez elles du même type de produits. Ce démonstrateur a permis au SHOM de montrer la faisabilité, de chiffrer le coût de ce type de levées pour pouvoir propager le concept et émettre des recommandations aux conseils régionaux ou au communes désireuses, tout en restant à son niveau c’est-à-dire en restant maître d’ouvrage et recommandeur national. Même si ces levées sont maîtrisées aujourd’hui, le laser n’est pas encore très mature et reste parfois un peu expérimental. Il est tout de même nécessaire de prendre quelques précautions au moins dans ces cahiers des charges si l’on veut récupérer des données utilisables partout et pour tous.

Un dernier mot sur ce qui reste à faire aujourd’hui. Tout d’abord, avec l’IGN, nous n’avons toujours pas conçu de politique de diffusion commune de ce type de données. Dans le cas du SHOM, ce sont des données le plus souvent acquises sur des fonds de l’Etat, sur le budget du Ministère de la défense, le SHOM n’ayant pas de vocation commerciale. Ces données sont diffusées à prix coûtant, pour un prix de diffusion marginal, en respect de la circulaire Baladur de 1994. Côté IGN, c’est moins évident dans la mesure où une partie de ses travaux sont parfois financés par l’Etat et parfois aussi sur fonds propres. D’où la difficulté actuelle de convenir avec l’IGN d’une tarification de ce type de produits qui mêlent à la fois des données terrestres et des données marines. Aujourd’hui nous avons une convention cadre avec l’IGN pour, en plus de la résolution des problèmes techniques résiduels, adopter une politique commerciale commune. Une autre difficulté est que ce projet coûte de l’argent – ce démonstrateur a coûté 500 000 € - et il est possible de globaliser davantage les levées et de faire des économies d’échelle. Il est dommage de ne pas avoir profité d’avoir un avion, un laser, dans le Golfe du Morbihan, pour ne pas étendre ces mesures aux Glénan et à tous les abers bretons. C’était faisable, en juin 2005 il faisait beau, la fenêtre météo était clémente et on aurait pu prolonger ce type d’expérience sur les bords. Ce type de produit coûte cher et il revalorise toutes vos études et il sera très difficile au niveau central, d’amasser en un seul endroit tout l’argent nécessaire pour reproduire ce démonstrateur sur les côtes de France et d’Outre-Mer. On le sait aujourd’hui, les projets jacobiens sont au niveau central, au niveau du SHOM et de l’IGN à Paris et l’argent est plutôt dans les régions. Je pense que le bon mécanisme est d’isoler dans les collectivités territoriales, là où il y a de l’argent mis à dispositions par l’Etat dans les pôles de compétitivité, par exemple pour faire de la Gestion Intégrée des Zones Côtières, une partie de ces sommes pour, dans un premier temps et avant de se lancer dans des études, constituer un socle cohérent sur lequel toutes les études pourront s’appuyer. Beaucoup de communes souhaiteraient disposer de cela, Litto 3D n’est pas vraiment précurseur en la matière et on voit émerger beaucoup d’initiatives locales. Le problème est de les fédérer afin de faire des économies d’échelle dans la façon de traiter les levées et pour que toutes les données acquises dans le cadre d’études très différentes les unes des autres puissent également être composées les unes avec les autres. L’intérêt est de répondre à cette fameuse recommandation européennes qui est de fournir un socle altimétrique continu entre la terre et la mer, qui est une continuité à l’image de la fédération d’efforts qu’il faudra faire sur le projet.
Je vous remercie de votre attention.





Mis à jour le 21 janvier 2008 à 10:32