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Porthmouth Naval Base Property Trust. 20 ans après, retour d’expériences Porthmouth Naval Base Property Trust. 20 ans après, retour d’expériences
Peter Goodship
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16 octobre 2008 Table ronde 1
Discours de Peter Goodship :
(transcription sous réserve de validation)
Bonjour,
Je vais faire une brève présentation de la reconversion de l'arsenal de Portsmouth. Il y avait trois bases navales au Sud de l’Angleterre : Chatham, Plymouth et Portsmouth. Au début des années 1990, le gouvernement britannique décide de fermer la base de Chatham, de privatiser celle de Plymouth et de réduire en partie celle de Portsmouth. Comme Brest, Portsmouth est encore aujourd’hui une base navale importante. Le nombre de personnes travaillant à la base navale a beaucoup diminué depuis la fin de la seconde guerre mondiale, il est passé de 25 000 à 17 000 personnes. La particularité de Portsmouth est la cohabitation de la base navale et du tourisme. D’ailleurs, ce qui attire les touristes se trouve en plein milieu des installations militaires. C’est positif puisque les personnes sont intéressées par l’aspect historique et aussi par l’aspect actuel. Elles sont intéressées par le spectacle des bateaux en activité, des manœuvres.
C’est quelque chose dont le public est demandeur. Mais en terme de sécurité, cela complique beaucoup les choses.
Les principales attractions touristiques sont :
- un bateau qui patrouillait dans les eaux britanniques et que Napoléon appelait « le serpent noir parmi les lapins ». C’est le premier bateau à coque métallique avant que les Français ne construisent le Gloire.
- La Marie-Rose qui est un des bateaux d’Henri VIII, renfloué à côté de Portsmouth.
La base navale de Portsmouth accueille 750 000 visiteurs par an dont 500 000 entrées payantes. Mais ces revenus ne couvrent pas la dépense. Il y a donc un versement de la National Lottery ; comme vous le savez en Grande-Bretagne une partie des gains de la Lottery peut être versée à des institutions comme Portsmouth.
Nous dépendons également de dons et de la commercialisation des produits vendus dans des magasins.
Sylvie Andreu : Pouvez-vous préciser le système de financement et la collecte des fonds ?
Peter Goodship : L’argent est donné pour des projets spécifiques, c’est par projet qu’on peut demander de l’argent. De façon typique, un projet doit avoir un financement privé, de l’argent de l’Europe (un peu) et après on peut demander de l’argent à la National Lottery. Pour avoir le droit de faire appel à ces fonds, il faut avoir déjà 40% du financement nécessaire, c’est qu’un complément basé sur le fait que nous avons déjà trouvé d’autres fonds.
Nous avons fait un film qui montre le rôle des bateaux dans la Navale, du style James Bond pour que cela plaise. C’est une histoire d’or volé et à la dernière minute, le bateau arrive pour sauver tout le monde et tout se termine bien. C’est un film qu’on peut voir dans un premier temps et ensuite, on peut avoir une interaction et prendre la place des personnages du film.
La structure de l’organisation est simple : il y a un conseil d’administration composé de personnes qui viennent du domaine de l’architecture, des géomètres… et différents comités.
Nous avons transformé les bâtiments qui étaient à l’origine des hangars de construction, des endroits où on fabriquait les mâts… pour les transformer en musée, en restaurants, en magasins…
Un bâtiment du XIXème siècle, construit non par un architecte mais par un ingénieur, avait été touché par une bombe lors de la dernière guerre. Nous l’avons repris et avons construit à l’intérieur un auditorium de 300 places. Nous avons également des illuminations pour montrer le bateau le Victory.
A l’entrée de l’Arsenal, il y a un parking. À l’origine, c’était un jardin. Nous n’avons pas refait le jardin identique à l’ancienne, mais nous nous en sommes inspirés pour en faire une version moderne. Ce un jardin plaît beaucoup au public.
Au niveau de la billetterie, avant les gens faisaient la queue dehors, sous la pluie, parce qu’il pleut parfois en Grande-Bretagne, alors nous avons construit un nouveau bâtiment d’accueil.
Dans un ancien hangar destiné à la construction des bateaux, nous avons aménagé un grand restaurant, une salle d’exposition et des magasins. Nous avons gardé certains éléments comme des traces de peinture par terre pour garder le souvenir d’un espace de travail. Les expositions se font sur les compétences dans le domaine maritime. Nous avons également voulu conserver le volume, le grand espace de ce bâtiment pour avoir la même sensation.
Nous avons aussi récupéré des bâtiments du XIIIème siècle, de la même époque que le Victory dont on parlait tout à l’heure. Ces bâtiments avaient été touchés pendant la guerre et en particulier un petit clocher avait été détruit. Nous avons décidé de le reconstruire. Nous avons retrouvé des croquis qui montraient comment le clocher avait été construit. En se basant dessus l’architecte a fait les plans, mais juste avant le démarrage des travaux, nous sommes tombés sur des photographies des années 30 qui montraient que ce n’étaient pas les croquis qui avaient été suivis. En fait le clocher ne ressemblait pas du tout à celui du croquis.
Nous avons parlé ce matin de développement durable. Depuis longtemps on réutilise du bois qui a servi à faire des bateaux pour en faire des bâtiments. C’est le cas pour les maisons du XVIIIème siècle. Nous on se sert par exemple de canon pour soit protéger le coin d’un bâtiment soit le bord d’un quai. De la même façon, nous avons continué dans la même idée en utilisant du bois ou du granit pour créer des endroits où l’on peut s’asseoir et la manière dont le bois est coupé reprend la forme des coques de bateaux.
A la place d’une ancienne brasserie nous avons construit des logements – entre 500 et 600 – et un parking.
Un des projets pour l’avenir est de réunir tout ce qui a été récupéré sur l’épave de la Mary Rose. Pour l’instant, l’épave est dans un endroit et tout ce qui a été récupéré est ailleurs donc nous voulons tout réunir dans un seul bâtiment. Nous espérons pouvoir le faire pour l’année des Jeux Olympiques en 2012.
Nous nous sommes rendus compte assez vite que le tourisme ne suffisait pas et donc nous avons voulu diversifier et avoir autre chose comme une économie du soir.
Sylvie Andreu : Qu’est-ce que l’économie du soir.
Peter Goodship : Nous avons des horaires à l’anglaise. En hiver toutes les installations ferment à 17h et 18h en été. Nous avons un cinéma qui fonctionne plutôt bien pour l’instant et nous nous sommes rendu compte que juste à côté, à l’extérieur du site, il y a des restaurants, des casinos, des night clubs… qui fonctionnent le soir. Donc nous avons pensé que nous pourrions attirer aussi du monde le soir. Il y a déjà à bord des bateaux des dîners officiels pour des entreprises. Nous pensons nous développer dans cette direction en restant ouverts le soir, en proposant soit des concerts, soit des restaurants… Entre la base navale et ce quartier « du soir », il y a une zone complètement désaffectée, à l’abandon. Et c’est cette zone-là que nous souhaiterions développer évidemment pour concurrencer le quartier existant mais aussi pour faire une passerelle entre ces deux espaces de vie alors qu’au milieu, pour l’instant, il y a un espace mort.
Nos plans étaient assez avancés pour commencer à transformer un bâtiment en restaurant quand le club de football de Portsmouth a avancé l’idée d’avoir un stade juste à l’entrée du port. Or, ce n’était pas vraiment la vue qu’on avait imaginée pour le restaurant. Finalement ça ne va pas se faire. Le projet est de déplacer le bateau qui est à quai, de le mettre sur un autre quai et de faire un hôtel flottant. Les recettes de cet hôtel flottant payeraient la rénovation du bâtiment que nous voulons transformer en restaurant, boutiques… Il y a aussi une Ecole navale que nous voulons transformer, il y a également le premier bâtiment où l’ingénieur Brunel a développé les outils pour passer à la production de masse.
En conclusion, je voulais dire qu’une nation reste vivante si sa culture reste vivante.
Sylvie Andreu : Quelle est la distance entre Portsmouth et Londres ?
Peter Goodship : environ 100 km.
Sylvie Andreu : Est-ce que justement la relative proximité de Portsmouth avec Londres peut expliquer le succès populaire de ce site ?
Peter Goodship : Non je ne pense pas que cela ait grand chose à voir avec Londres, c’est plutôt la qualité du patrimoine, les bateaux qui sont là qui sont vraiment des bateaux mythiques. Les gens viennent pour voir ces bateaux en premier lieu et ensuite pour voir les bâtiments.
Sylvie Andreu : Ce qui me frappe c’est le gigantisme, l’ampleur de ces projets. On a l’impression qu’il faut l’échelle d’une vie, c’est un site à dimension urbaine.
Peter Goodship : Oui, en effet.
Françoise Péron : Je voudrais d’abord vous remercier d’avoir traversé la Manche pour répondre à notre appel. Je crois que nous avons tous été très intéressés par cet exemple de Portsmouth, ce que vous avez dit et puis l’élargissement. Sylvie Andreu vient de souligner le rejaillissement de l’arsenal sur la ville et la façon dont cet arsenal a permis de moderniser la ville. Je crois qu’à Brest, nous sommes particulièrement sensibles à cette question. J’ai toujours espoir qu’un jour, entre les élus brestois et vous, il pourrait y avoir une rencontre de travail parce que je crois que ce serait très intéressant. Le chiffre des visiteurs est également impressionnant : 750 000 visiteurs par an dont 500 000 payants ! La différence d’échelle avec le projet de rénovation du Plateau des Capucins à Brest, s’explique peut-être un peu par la proximité de Londres mais surtout par l’aspect évolutif de votre projet.
Quand j’ai parlé à l’Association Nationale des Elus du Littoral, j’ai insisté auprès des élus pour que les projets ne soient pas bouclés à l’avance. Il faut commencer et petit à petit, les choses prennent de l’ampleur. Je crois que c’est important. L’autre aspect que vous avez souligné et qui est également intéressant c’est le mode de financement. Le financement par une loterie, nous y avions un peu pensé pour le Conservatoire national du littoral et des rivages lacustres, et j’y avais aussi pensé pour le patrimoine maritime en France, s’il y avait un véritable plan national de mise en valeur. Vous nous avez montré aussi, et nous sommes en train d’y venir, que vous êtes dans une logique de financement et d’ouverture au grand public. Ce que vous nous avez dit sur la projection du film grand public sur la mer, nous sommes en train d’y venir tout doucement. Je citerai par exemple ce qui va passer le 9 décembre, en relation avec le salon de la plaisance à Paris. Nous allons remettre le prix de la Corderie Royale à un ouvrage qui semble intéressant et en même temps, il y aura deux séances de projection de films documentaires et aussi des films grand public comme vous commencez à le faire c’est-à-dire avec de la grande mise en scène qui permet d’attirer des jeunes et de leur faire comprendre un peu cet univers.
Mis à jour le 09 février 2009 à 10:06